Le pain de la maison

On sait que l’armée de l’est, commandée par le général Bourbaki, et oubliée dans l’armistice qui fut conclu avant la signature de la paix en 1871, dut passer la frontière suisse, pour éviter la destruction ou la capitulation.

On vit arriver, par l’hiver le plus vigoureux, dans toutes les villes et dans tous les villages de la Suisse française, des milliers et des milliers de pauvres jeunes malades, affamés et transis de froid.

La Suisse se montra hospitalière.

Nombreux furent pourtant les soldats français que les rigueurs de la campagne avaient usés et qui moururent sur la terre helvétique.

Parmi ceux qui furent recueillis à Genève se trouvait un jeune Breton, qui n’avait quitté sa terre natale que pour obéir à la conscription.

Il savait à peine quelques mots de français.

Pendant quelques mois il avait suivi avec les autres, sous la neige et sous la mitraille, le drapeau de son régiment, et maintenant, sans comprendre ce qui arrivait, il se trouvait sur une terre étrangère, à trois cents lieues de sa chère Bretagne.

Affaibli déjà par les privations et les souffrances de la guerre, le jeune homme tomba malade d’une sorte de langueur que rien ne pouvait guérir.

A l’hôpital, où on l’avait placé, les sœurs étaient pleines d’attentions pour lui.

On lui préparait des mets spéciaux pour tenter son appétit, rien n’y faisait, ni aliments, ni remèdes ; les docteurs y perdaient leur science, et le pauvre garçon s’en allait tout doucement.

Il restait de longues heures immobile et silencieux, les yeux perdus dans le vague, comme s’il entendait au loin les rumeurs de la mer bretonne, ou respirait les parfums de la lande natale.

Frappés de la gravité de son mal, des amis qui le soignaient pensèrent qu’il était temps d’avertir sa famille.

On obtint de lui l’adresse, de difficile orthographe, à laquelle il fallait écrire, et quelques jours plus tard on vit arriver le père du jeune Breton.

Le bonhomme portait le costume si pittoresque de son pays : la culotte courte, le gilet rouge, la petite veste aux multiples boutons, et le chapeau noir, à larges bords.

Il avait en sautoir une musette dans laquelle étaient contenues ses provisions de route.

Malgré son ignorance de la langue, le vieux Breton trouva le chemin de l’hôpital, et fut mis en présence de son fils, qui ne s’attendait guère à cette visite.

Le jeune homme souleva faiblement la tête pour répondre à l’étreinte passionnée de son père.

Mais il se laissa retomber sur son lit comme si cet effort l’avait épuisé.

- Mon pauvre gas ! te voilà donc malade ? Mais ce ne sera rien va ; je suis venu te chercher, et quand tu seras guéri, nous partirons ensemble pour la maison.

Le petit soldat eut un pâle sourire.

- Ah ! la maison, je ne la reverrai plus ; je vas mourir, mon père…

- Non, tu ne mourras pas… je suis là maintenant. Et là-bas ta mère prie pour toi.

Les assistants écoutaient, émus, ce dialogue auquel ils ne comprenaient rien, mais dont ils saisissaient le sens par les gestes du père et du fils.

La première visite ayant assez duré au gré du médecin, on fit signe au père qu’il était temps de partir.

- Je reviendrai demain, mon gas. Tiens, je vas te laisser ma musette ; il y reste du pain que j’ai emporté tout chaud de chez nous, voilà quatre jours. C’est ta mère qui l’a fait cuire…

Les yeux du jeune homme brillèrent soudain d’un éclat extraordinaire.

Il se souleva avec énergie.

- Du pain que ma mère a fait cuire ! Du pain de la maison ! Donne-m’en un morceau, père, je veux en manger toute de suite !

- Mais il est sec, mon fieu ; tu ne pourras jamais le manger.

Déjà, cependant, le petit Breton s’était emparé de la miche entamée dans laquelle il mordait à belles dents, avec une avidité dont les sœurs, qui lui avaient préparé inutilement tant de mets délicats, ne l’auraient jamais cru capable.

Et tandis qu’il mangeait, on l’entendait redire, la bouche pleine :

Le pain de la maison ! Le pain de la maison !

Quelques jours après, le jeune homme était guéri, et assez fort déjà pour entreprendre avec son père le long voyage du retour.

Ruben SAILLENS

A travers les journaux et revues étrangers

Du journal anglais " Echoes of Service " :

" Nous venons de lire une " lettre ouverte " d’un Français, autrefois athée, qui alla en Russie, dans l’espoir d’y trouver le paradis terrestre qu’on lui avait décrit.

" Il y découvrit exactement le contraire, et finit par être jeté en prison sans savoir pourquoi !

" Mais c’est là qu’il trouva le Sauveur, par le moyen d’un compagnon d’infortune, enfermé dans la même cellule.

" Ce disciple de Christ qui lui indiqua le chemin du salut, fut mis à mort par les autorités soviétiques, au bout de quelques mois.

" Il est consolant de voir que, au milieu des plus grandes souffrances, d’innombrables multitudes de croyants réussissent, malgré les risques de mort, à se rassembler en secret, dans des endroits écartés, pour prier et méditer la Parole de Dieu.

" D’après cette lettre, nous comprenons que beaucoup de conversions se produisent et que le nombre des enfants de Dieu augmente sans cesse. "

Du Lutheran (Amérique) :

" Plus de six millions de lecteurs des quatre plus grands quotidiens de Londres, trouvent chaque matin, dans leur journal, l’horoscope du jour.

" A la fin de l’an dernier, l’astrologue officiel de l’un de ces journaux étant tombé malade, l’horoscope manqua quelques jours.

" L’Administration de ce quotidien reçut aussitôt cinquante mille lettres affolées demandant la raison d’une pareille omission et en quelques heures, un nombre incalculable de télégrammes, coups de téléphone et même de visites en personnes, se succédèrent sans interruption dans les bureaux !

" Tous ces gens-là ne pouvaient faire face au travail ou au plaisir d’une seule journée, sans leur dose quotidienne de fatalisme astral !

" La Bible qui est toujours d’actualité, passe un jugement sur ces pauvres dupes. Il se trouve dans Esaïe, chapitre 47, verset 13 :

" Tu t’es fatiguée, à force de consulter

Qu’ils se lèvent donc et qu’ils te sauvent

Ceux qui connaissent le ciel,

Qui observent les astres,

Qui annoncent, d’après les nouvelles lunes,

Ce qui doit arriver ! "

Des impressions d’un Aumônier militaire aux Armées dans Christ et France 

" La nuit tombe et… la pluie aussi.

" Par un sentier détrempé, je hâte le pas, protégé par mon casque et mon lourd manteau.

" A peine ai-je abordé la grande route nationale, que je perçois le bruit rythmé d’une troupe en marche.

" Bientôt, passe à côté de moi, un bataillon dit " chasseur ".

" Je regarde passer ces hommes.

" Il y en a de tous les âges et tous, les vieux et les jeunes, ils marchent du même pas, silencieux et graves, vers la ligne Maginot.

" Tout à coup, l’un d’eux sort des rangs :

" - M. l’Aumonier, salut ! Pouvez-vous faire quelques pas avec nous ?

" Et je rebrousse chemin, au milieu des chasseurs.

" Pendant une dizaine de minutes, on fait connaissance, on parle du pays, de la famille.

" L’aumônier sort de sa sacoche, un " livre de prières du soldat français " et quelques traités qu’il remet au soldat. Une poignée de main bien sentie et on se sépare.

" - A bientôt, mon cher. Bon courage.

" - Au revoir M. le pasteur. Merci. Comme il fera plus chaud cette nuit, sur la route !

Ailleurs, c’est un chef, le général X, qui me reçoit dans son cabinet improvisé.

" Catholique, il me place tout de suite sur le terrain religieux, et notre entretien se termine par ces mots :

" - M. l’aumônier, je suis prêt à vous aider dans toute la mesure du possible. La force que vous représentez est le plus puissant auxiliaire de notre armée.

" Je voudrais pouvoir relater quelques-uns des entretiens que j’ai eus depuis deux mois, dans les cantonnements, dans plusieurs Etats-Majors ; auprès d’Officiers, de Sous-Officiers et de soldats, au chevet de quelques blessés.

" Parler de plusieurs de nos laïques de France qui sont à l’heure actuelle de véritables apôtres dans leurs unités.

" Dire avec quel élan, quel sérieux, nos soldats se groupent pour un culte même au pied levé, et écoutent le message de réconciliation et de salut !

" Je voudrais dire avec quelle simplicité, ces hommes que je coudoie chaque jour, acceptent les sacrifices qui leur sont imposés par la perspective du combat, et peut-être plus encore par la stagnation, les longues et monotones journées.

" Le moral de nos troupes est admirable.

" Et c’est cela surtout que nous voudrions, non seulement dire, mais montrer à l’arrière.

" Un Bas-Rhinois dont la femme et les trois petits sont évacués dans le Gers, le foyer abandonné, l’avenir matériel compromis me disait : " C’est dur de n’avoir plus de foyer. Mais nous tiendrons le temps qu’il faudra. Il faut en finir. "

" Ce que nous devons proclamer, c’est l’accueil qui est fait ici à l’Evangile.

" Jamais peut-être nous ne trouverons autant de facilités à déployer notre drapeau et à trouver le chemin des cœurs.

" Officiers et soldats, face à l’ennemi qui concrétise pour eux la puissance du mal et le plus effroyable matérialisme, ont compris que les plus belles idéologies sociales de ces 20 dernières années, aussi bien que les viles exploitations des partis politiques les ont conduits à la guerre.

" Ils ont compris que l’homme ne vit pas de pain seulement (que ce pain soit le bien-être humain le plus légitime, ou les plaisirs, ou l’argent), et qu’il serait temps de faire l’ultime expérience, celle que jusqu’ici on a refoulée et méprisée : l’expérience chrétienne.

" Un ancien communiste me disait récemment après une heure de conversation inoubliable : Depuis six mois que je le connais (Jésus-Christ), Il ne m’a jamais déçu. C’est Lui Le Chef et je n’en veux plus d’autres.

André LAMORTE

Aumonier militaire aux armées

La Bible de ma mère

" Eternel ! Je cherche en toi mon refuge ; sois pour moi un rocher protecteur " (Psaume, chapitre 31, verset 1).

En août 1944, déporté politique français, je suis interné dans un camp de prisonniers en Allemagne.

A l’arrivée, chacun de nous passe, l’un après l’autre, dans un premier baraquement, puis en ressort, le crâne rasé, revêtu d’un uniforme grisâtre.

Un peu plus loin, on nous enlève tous les objets personnels, même les plus nécessaires pour vivre.

Enfin, chacun passe devant un officier S.S. pour être questionné et inspecté.

" Il faut que je sauve quelque chose ", me dis-je.

Rapidement je fouille dans ma besace et en ressort la petite Bible de poche, suprême cadeau de ma mère éplorée.

Totalement dévêtu, mais tenant en main ce livre qui m’embarrasse, je réponds aux questions de l’officier qui n’a rien vu.

Mais, me tendant un porte-plume, il ordonne : " Signez là ! "

Alors, je pose la Bible sur la table et je signe.

Le S.S. prenant le livre, me lance un regard interrogateur.

Posément, j’explique : " C’est la Bible de ma mère. "

Etonné, l’officier hausse les épaules et jette la Bible sur la table : " Au suivant ! "

Pourquoi cette faveur m’a-t-elle été accordée ?

J’ai eu la conviction que la main de Dieu me suivait.

Mon cœur s’est ouvert à la recherche d’un vrai refuge.

Je me suis mis à lire la Bible, elle m’a parlé, m’a rassuré et consolé.

Le Psaume, chapitre 31, est devenu très précieux pour moi.

J’ai crié à Dieu dans ma misère. Dieu n’était plus pour moi un étranger, j’ai su qu’Il m’aime.

C’est ainsi que dans cet antre de Satan, la Bible de ma mère est devenue pour moi la vivante parole de Dieu.

Christ s’est révélé à moi comme mon Sauveur et mon Seigneur.

D’après " Le cri de guerre ", adapté par Charles RICK

Calendrier 2012 - Vivre Aujourd'hui

Pardonner ? Pas si facile

" De nouveau tu auras compassion de nous, tu piétineras nos péchés, et au fond de la mer, tu jetteras nos fautes " (Michée, chapitre 7, verset 19).

Sous l’occupation des Pays-Bas par les armées hitlériennes, Corrie ten Boom et ses proches avait été arrêtés à cause de l’aide apportée aux Juifs.

Elle raconte, qu’après la guerre, elle a rendu visite à Karl, l’un de ses anciens geôliers, incarcéré dans la prison de Vught qu’elle connaissait bien :

" En pénétrant dans la cour, je me rappelle de m’y être tenue, avec Bep ne sachant pas si on allait nous fusiller.

Puis je me rapproche de la cellule où se trouve Karl.

Je lui dis que sa mère est heureuse qu’il ait confié sa vie à Jésus. Puis j’ajoute :

- J’ai aussi été dans cette prison.

- Quand ?

- En 1944.

Il pâlit.

- Alors nous nous connaissons ?

- Oui, certainement !

Dans nos souvenirs revivent les cruautés dont Karl s’est rendu coupable.

Puis un sourire illumine son visage :

- Combien je suis heureux d’être à présent délivré de mes péchés.

De sombres pensées traversent alors mon esprit : Est-ce vraiment si simple ?

Je repense à mon père, à ma sœur et à beaucoup d’autres qui ont été assassinés par lui et ses collègues dans les prisons ou les camps de concentration.

A présent, tes péchés sont simplement enlevés. Est-ce si simple ?

Je ne dis rien. Mais mes pensées tournent en rond.

Jésus a pardonné les péchés de Karl ; il les a jetés au fond de la mer.

Et moi, je les remonte à la surface.

Je prie : - Seigneur, Jésus, pardonne-moi ces pensées ! "

Alfred KUEN

Calendrier 2012 - Vivre Aujourd'hui

Lecture proposée : Evangile selon Matthieu, chapitre 6, versets 7 à 14.

Prière pour la paix

De la poussière, notre prière

S’élève jusqu’à toi, Seigneur !

Le bruit des armes, le flot des larmes,

N’attendriront-ils pas ton cœur !

Vois la souffrance, douleur immense,

De la veuve et de l’orphelin.

Sous la mitraille, sous la ferraille,

Nos frères jonchent le chemin !

Dans ta clémence, sors du silence,

N’auras-tu pas compassion ?

De ta demeure fais sonner l’heure

De la commisération !

Ah ! dans ta grâce, pardonne, efface

Tout le mal que nous avons fait !

Que cette guerre soit la dernière !

Seigneur, Seigneur, rends-nous la paix !

Adèle PELAZ

Avant d'être soldat

Encore quelques jours et d’un bout à l’autre de la France nos conscrits iront rejoindre leurs régiments respectifs.

Nos conscrits : c’est-à-dire, nos amis, nos frères, nos fils.

Que sera pour eux cette vie nouvelle et inconnue ?

Deux années loin de la famille peuvent être autant d’années d’émancipation ou vers le bien ou vers le mal.

En effet, le jeune homme moderne, ayant toujours vécu dans le monde, profitera de tous les moments de loisir offerts par la vie militaire pour se laisser aller encore plus facilement vers les nombreux plaisirs qu’une grande ville de garnison mettra à sa disposition.

Et là loin de l’œil paternel il pourra, à sa guise, goûter de tous ces plaisirs et de toutes les nouveautés du siècle, distractions néfastes entrainant toujours la décadence morale.

Il est de tradition qu’un " bleu " arrive au régiment, le gousset bien garni ; bien des parents inconscients donneront à leur fils le jour du départ une folle somme d’argent avec la pensée bien arrêtée qu’ainsi armé, le " bleu " pourra vaincre bien des difficultés !

O ironie, voyez-le donc, ce bleu, faisant son entrée dans la chambrée ; il est la proie des anciens, il s’est déjà laissé entraîner, il en sera de même aujourd’hui.

A l’arrivée des recrues, le quartier est consigné pendant huit jours, pour les jeunes soldats, mais qu’importe, les anciens flairent l’aubaine et se débrouillent pour faire sortir leur bleu.

Voyez-le dans les rues ; en vrai mouton, il suit les autres, ne sachant où il va, dans cette ville qu’il ne connait pas.

On s’arrête pour boire, il s’arrête aussi, il boit et il boit encore ; ceux qui l’entrainent lui raconteront des histoires sur le métier ; le pauvre bleu en a déjà par-dessus la tête, tandis que, peu à peu sa bourse se vide…

Il est nuit maintenant… On erre toujours dans les rues, l’on s’arrête encore car le regard est toujours captivé dans ces vieux quartiers mal éclairés où l’atmosphère est corrompue…

Ainsi se termine cette première journée et les jours suivants il en sera de même ; le bleu est dressé, il sait maintenant où dépenser l’argent que ses faibles parents lui enverront, et qui sait, en se privant peut-être eux-mêmes car une mère ne se prive-t-elle pas toujours pour son fils ?

Au contraire, le jeune homme libre, qui n’a pas connu l’esclavage de la camaraderie et qui a su rester maître de ses passions en combattant le mal sous toutes ses formes, s’efforcera à la caserne de progresser dans la voie du bien.

Il y sera même poussé par le triste spectacle des vies déréglées, il s’armera davantage de ce courage moral qui fait, malgré tout, l’admiration des jeunes gens et il vaincra.

Sa conduite à lui sera en exemple aux autres.

Le voici à la caserne depuis huit jours.

C’est dimanche, jour de repos et de sortie car la consigne est levée et le quartier est enfin libre pour les bleus.

La musique du régiment joue le réveil, puis un pas redoublé ; il est gai, notre jeune soldat car après huit jours réglementaires de consigne il va enfin passer la porte du quartier et se promener dans cette ville qu’il ne connait pas encore.

Le voilà dans la rue, il se sent libre lui, jeune soldat prévoyant, il garde dans son cœur le souvenir du foyer de famille, il pense aux parents laissés là-bas bien loin, ses frères et sœurs, sa fiancée peut-être.

Il se souvient des beaux dimanches passés ensemble et tous ces souvenirs lui commandent de demeurer ferme, de continuer cette vie paisible à l’abri des tentations louches.

Tout en se promenant, il cherche et arrive devant un lieu de culte.

O bonheur ! Que voit-il d’autres, des anciens soldats assis là. Ceux-là il ne les perdra pas de vue désormais ; il en fera des camarades.

A la sortie, l’on se serre la main, la connaissance est faite.

Il est fier, notre jeune soldat d’avoir rencontré des amis aux mêmes sentiments que lui et il se laisse conduire en toute confiance à travers la grande ville pour en admirer les agréments.

On s’arrête devant une maison de modeste apparence ; c’est le local de l’Union chrétienne de jeunes gens.

Là, il fait encore la connaissance d’amis tant civils que militaires.

Cet accueil lui fait du bien, il se sent chez lui, il éprouve alors le besoin, dans ce lieu paisible et tranquille d’écrire une longue lettre aux siens pour les rassurer et leur faire part de sa joie.

Ainsi se termine la première journée de sortie de ce jeune soldat, sûr de lui-même et maître de ses passions.

Il regagne la caserne, le cœur joyeux.

Le voilà dans la chambrée ; mais qu’est-ce que cela ! Pourquoi tant de soldats couchés et dont la plupart ne sont pas sortis en ce beau dimanche ? Pourquoi ?

Ah ! c’est que durant huit jours ceux-là ont dépensé dans une folle ivresse, leur argent ! et chez eux, la gaîté fait place à la tristesse ; ils sont las, découragés, vaincus et se sentent vraiment malheureux, aussi ils essayent de dormir pour oublier.

Mais le jeune homme que nous avons suivi à l’Union de jeunes gens, rend déjà compte de sa journée, des voisins sont étonnés ; lui est radieux, il sait désormais où passer ses moments de loisir, il sait où il pourra oublier les mauvaises heures de la vie de caserne et en vrai vainqueur il se sent heureux.

Ainsi, le jeune homme partant pour la caserne peut passer deux années tristes ou heureuses ; tristes s’il appartient à la première catégorie de ces jeunes gens ; heureuses, s’il a le bonheur d’appartenir à la seconde.

Heureux le jeune homme qui a l’immense privilège de recevoir une solide éducation morale et chrétienne !

C’est là la plus sûre des armes pour les luttes futures du jeune soldat, car il y a des luttes à soutenir, des préjugés à combattre, mais, cher jeune homme, sous les yeux duquel peuvent tomber ces lignes, sache que la victoire est la récompense de celui qui combat le bon combat, de celui qui a pris le Christ pour son Sauveur et son Maître.

Je parle par expérience et durant mes trois années de service militaire j’ai acquis la certitude qu’une vie exemplaire est enviée au fond et bénie surtout.

Oui, victoire et triomphe te sont réservés à toi qui comprend cela.

Je sais quelles sont tes aspirations, une fois ton service militaire terminé ; je sais que tu rêves à une chère fiancée, je sais que tu la veux pure ; et toi, pourquoi ne le serais-tu pas ?

Sache que le bonheur du foyer est à ce prix.

Fais en sorte que tes deux années de service ne demeurent pas en souvenir dans ta conscience comme des années de regrets et de remords.

Fais en sorte qu’à ton retour, tu puisses comme le poète, dire à celle que le ciel prédestine à ta foi : Je t’apporte un cœur pur qui s’est gardé pour toi.

N. CRESPIN

Lettre d'un Sous-Lieutenant français

Adressée à M. le pasteur Saillens

" Il est 21 ½ h. A 2 h. 15 demain matin, nous allons prendre nos emplacements en vue d’une attaque.

La fatigue et le sommeil m’accablent, je ne saurais cependant prendre quelque repos avant de vous avoir écrit à la hâte ces quelques lignes qui seront peut-être mes lignes d’adieu.

Un bataillon de notre régiment doit s’emparer de la lisière sud du bois ; son mouvement sera soutenu par notre bataillon qui forme la deuxième ligne d’attaque…

L’entreprise est pleine de périls, en raison des défenses dont sont hérissées les tranchées allemandes.

Beaucoup des nôtres n’en reviendront pas.

N’importe, jamais je n’ai été aussi tranquille, aussi confiant, aussi heureux. Mon âme est en paix, réconcilié que je suis avec mon Dieu, mon Créateur et mon Juge, par la foi en Jésus-Christ mon Sauveur.

Et cependant, jamais je n’ai eu plus qu’aujourd’hui le sentiment de mon indignité.

Ma foi, mon assurance, sont d’autant plus fortes.

Convaincu de mon incapacité de me sauver moi-même, de mon infirmité de nature et radicale, je me repose d’autant plus fortement et désespérément sur Jésus qui a dit : " Hors de moi, vous ne pouvez rien faire. "

Mon impuissance fait que j’attends tout de sa toute promesse, et que je m’attache sans réserve à ses promesses si positives, si absolues : " Celui qui croit en moi vivra quand même il serait mort. "

" J’ai fait scandale un de ces jours lorsque j’ai affirmé, à notre table d’officiers, que j’étais, fort de la Parole de Dieu, certain d’être sauvé, et qu’il n’était même rien dont je fusse plus sûr que de mon salut.

Je me suis fait taxer d’orgueilleux. Pourtant, leur ai-je répondu, quelle plus grande humilité et humiliation implique cet acte de foi totale en Celui sans lequel je ne suis et ne puis rien !

Quelle joie, cher monsieur, que de s’abandonner entièrement à Dieu, pardonné et sauvé, et certains que rien au monde ne nous séparera de Lui, pas même la mort, au contraire, puisque par elle l’union bienheureuse se fera plus intime et plus parfaite.

Mon seul regret et la seule raison pour laquelle je demandais tout à l’heure à Dieu de me laisser vivre encore, est que je lui présenterais une âme si peu dégagée encore du péché, tellement loin de réaliser cet idéal de sainteté auquel sont conviés les enfants de Dieu.

C’est encore que je l’aurais trop peu confessé, que j’aurais trop peu manifesté son amour, trop peu fait en un mot pour Celui qui a tout fait pour moi.

Oh ! toute une vie ne serait pas de trop pour payer une telle dette en amenant au salut les âmes placées par Dieu autour de nous.

Je puis cependant me rendre ce témoignage qu’il n’est pas un homme de ma compagnie, pas un des officiers de notre table, auquel je n’aie présenté le salut par Jésus-Christ.

Oh ! bien imparfaitement, mais, j’aime à le croire, dans sa simplicité et avec son caractère de nécessité.

Et il m’a semblé que le sens spirituel s’éveillait chez ces hommes, à en juger au moins par leurs positions morales qu’ils rectifiaient, par plus de respect remplaçant une attitude qui fut par moments une véritable persécution, par une certaine sympathie pour mes idées.

" Ces derniers temps, j’ai été travaillé par le sentiment d’une lacune dans ma vie chrétienne.

Le chrétien isolé ne me semble pas être dans la vérité complète.

Même et surtout sur le terrain spirituel, l’homme est un être social, la loi du groupement est inéluctable.

J’envoie donc mon adhésion à l’Eglise de… ; si je meurs, cette église aura perdu un membre.

M. le pasteur Nick, qui a rencontré cet officier, écrivait de son côté à un ami :

" Il est un véritable aumônier laïque… il rend avec fermeté témoignage de Jésus-Christ.

A la veille d’une action qu’il estimait devoir être décisive et fatale à plusieurs, dans la tranchée il confessait à haute voix ses péchés, et les soldats de sa compagnie répétaient sa prière.

Une fois il souhaitait à ses collègues, camarades de table, de se convertir avant la fin de la guerre, et un prêtre-officier, de l’autre bout de la table lui a crié : " Je suis avec toi, X. ! "

A mes biens-aimés

Après sept mois maudits d’une guerre cruelle,

Je voudrais vous redire un peu de ma tendresse.

Je voudrais vous tracer, ici, en peu de mots,

Un peu de ma pensée, entre deux longs sanglots.

Je ne sais si demain j’aurai encore la vie,

Et j’aimerais avant qu’elle ne me soit ravie,

A vous laisser à tous un souvenir profond,

Un message d’amour, de sincère affection.

Oh ! Ma femme chérie, ma chère petite Hélène,

C’est à toi tout d’abord que, dans ma grande peine,

J’ai plus souvent pensé et pour toi j’ai prié,

Quand rudement la mort m’a maintes fois côtoyé.

Et, ma chère enfant, mon Amy adorée,

Le sang de notre sang, fruit du mariage sacré,

Bien des fois, en ces temps, ton si jeune papa

A failli pour toujours te fermer ses deux bras.

Bénie soit cette fille, cette femme, cette sœur,

Comme notre Germaine qui connaît sa douleur.

Nos pensées, nos prières ont souvent rencontré

Les pensées, les prières de tous nos bien-aimés.

Et vous, mes chers parents, parents de ma compagne,

N’allez pas croire alors que le père de ma femme

N’est pas aussi le mien, car en maintes occasions,

J’ai craint de le savoir en Allemagne en prison.

Et vous, chère maman, vous être sûre je pense,

Que le mari d’Hélène, le compagnon d’enfance

Avec elle et depuis, a bien souvent pensé

Et bien souvent prié pour vous comme par le passé.

Enfin petite sœur, peut-être tu l’ignores

Mais comme jadis, à toi ton frère songe encore

Et je sais bien que pour mon adorable Amy

Tu vins d’un cœur léger souvent de Landouzy.

Et bien d’autres personnes, j’oublierai aujourd’hui,

Et qui furent autrefois cependant mes amis,

Il me faudrait un livre pour tout y mentionner,

Les si nombreux frères qui ne sont oubliés.

Et toi, cher inconnu, qui naquis dans l’horreur,

Qui connus bien trop tôt la misère, la terreur,

Si je ne te connais, sache toutefois que ton père

A passé bien des soirs pour toi dans la prière.

Cher papa, c’est à vous que je m’adresse ensuite.

Nous fûmes privilégiés et bien que sans visite,

Nous eûmes bien souvent quoique éloignés toutefois,

L’occasion de parler et d’ouïr notre voix.

Nous parlâmes longuement, tendrement, l’âme ravie

De celle qui vous aime, qui me donna la vie.

A ma bien chère mère, sans cesse j’ai pensé

Toujours en y songeant, mon être a sangloté.

Nous nous entretenions, et non sans une larme

D’un enfant prisonnier, d’un frère sous les armes,

Quand l’autre jour enfin, mais toujours confiants,

Nous l’avons recouvré sain, sauf, reconnaissant.

Et nos pensées alors s’envolaient vers le gendre,

Mari de votre fille, et de ma sœur bien tendre.

Nous lui avons écrit, avec lui partagé

L’inquiétude, l’angoisse qui nous a consumés

. A tous ces êtres aimés, je veux redire encore

Que pour moi c’est la vie ou peut-être la mort.

Mais je veux que l’on sache, et je le crie bien haut,

Que le vrai rendez-vous doit se trouver là-haut.

Pleurez, priez, criez sans doute l’épreuve est dure,

Mais l’épreuve nous donne une foi bien plus sûre,

Que les nombreuses joies dont Dieu nous combla tant

Et qui nous laissèrent froids, et non reconnaissants

. Adieu, mes bien-aimés, je vous aime à jamais.

Si je vis, je voudrais le prouver désormais

Mieux qu’alors, plus soumis, plus doux, affectueux,

Pour vous rendre demain, de beaucoup plus heureux.

Adieu, mes bien-aimés, je vous aime à jamais

Si je meurs maintenant, le plus cher des souhaits

Est de vous retrouver là-haut tous réunis

Pour toujours enlacés, à tout jamais bénis.

Seigneur, Dieu Tout Puissant, exauce ma prière

Arrête ces horreurs, cette terrible guerre

Accorde à tous les miens, félicité parfaite

Et que seule, Seigneur, ta volonté soit faite.

Emile TURK

Dans La tranche le 20 février 1915

Le témoignage de Napoléon 1er

Le christianisme a un avantage sur toutes les philosophies et sur toutes les religions ; les chrétiens ne se font pas illusion sur la nature des choses.

On ne peut leur reprocher ni la subtilité ni le charlatanisme des idéologues qui ont cru résoudre la grande énigme des questions théologiques avec de vaines dissertations sur ces grands objets.

Insensés, dont la folie ressemble à celle d’un petit enfant qui veut toucher le ciel avec sa main ou qui demande la lune pour son jouet.

Le christianisme dit avec simplicité : " Nul homme n’a vu Dieu, si ce n’est Dieu. Dieu a révélé ce qu’Il était ; sa révélation est un mystère que la raison ni l’esprit ne peuvent concevoir. Mais puisque Dieu a parlé, il faut y croire. "

Cela est d’un grand bon sens.

Le Christ parle, et désormais les générations lui appartiennent par des liens plus étroits, plus sacrés, plus impérieux que quelque union que ce soit.

Il allume la flamme d’un amour qui fait mourir l’amour de soi, qui prévaut sur tout autre amour.

Aussi le plus grand miracle du Christ, sans contredit, c’est le règne de la charité.

Lui seul, il est parvenu à élever le cœur des hommes jusqu’à l’invisible, jusqu’au sacrifice du temps ; lui seul, en créant cette immolation, a créé un lien entre le ciel et la terre.

Tous ceux qui croient sincèrement en Lui ressentent cet amour admirable, surnaturel, supérieur ; phénomène inexplicable, impossible à la raison et aux forces de l’homme ; feu sacré donné à la terre par ce nouveau Prométhée, dont le temps, ce grand destructeur, ne peut ni user la force, ni limiter la durée.

Moi, Napoléon, c’est ce que j’admire davantage, parce que j’y ai pensé souvent, c’est ce qui me prouve absolument la divinité du Christ.

J’ai passionné des multitudes qui mouraient pour moi.

A Dieu ne plaise que je forme aucune comparaison entre l’enthousiasme des soldats et la charité chrétienne, qui sont aussi différents que leur cause.

Mais il fallait ma présence, l’électricité de mon regard, mon accent, une parole de moi ; alors j’allumais le feu sacré dans les cœurs…

Certes, je possède le secret de cette puissance magique qui enlève l’esprit, mais je ne saurais le communiquer à personne ; aucun de mes généraux ne l’a reçu de moi.

Je n’ai pas davantage le secret d’éterniser mon nom et mon amour dans les cœurs ou d’y opérer des prodiges sans le secours de la matière…

Maintenant que je suis à Sainte-Hélène…, maintenant que je suis seul et cloué sur ce roc, qui est-ce qui bataille et conquiert des empires pour moi ?

Où sont les courtisans de mon infortune ?

Qui se remue pour moi en Europe ?

Qui m’est demeuré fidèle ?

Où sont mes amis ?

Oui, deux ou trois, que votre fidélité immortalise, vous partagez, vous consolez mon exil.

Oui, notre existence a brillé de tout l’éclat du diadème et de la souveraineté.

Mais les revers sont venus ; l’or, peu à peu, s’est effacé.

La pluie du malheur et des outrages, dont on m’abreuve chaque jour, en emporte les dernières parcelles.

Nous ne sommes plus que du plomb, général Bertrand, et bientôt je serai de la terre.

Telle est la destinée des grands hommes, de César et d’Alexandre, et l’on nous oublie !

Et le nom d’un conquérant, comme celui d’un empereur, n’est plus qu’un thème de collège !

Nos exploits tombent sous la férule d’un pédant qui nous insulte ou nous loue.

Encore un moment : voilà mon sort et ce qui va m’arriver à moi-même…

Je meurs avant le temps et mon cadavre aussi va être rendu à la terre pour y devenir la pâture des vers…

Voilà la destinée très prochaine du " grand " Napoléon…

Quel abîme entre ma misère profonde et le règne éternel du Christ prêché, aimé, adoré, vivant dans tout l’univers !

Est-ce là mourir ?

N’est-ce pas plutôt vivre ?

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