Vous savez presque tous que, il y a quelque temps, j’ai pris part à une rencontre du groupe d’Oxford à Ermatingen.
Beaucoup d’entre vous savent également que j’y ai été profondément impressionné et abondamment béni.
Il m’est impossible de rendre ici tout ce que nous avons vécu là de grand et de beau, nous, c'est-à-dire ma femme et moi, et deux à trois cent participants, parmi lesquels trente ou quarante pasteurs et évangélistes de toutes nuances.
Les effets de toutes les expériences que nous avons faites là se feront sentir longtemps encore, et toujours plus loin.
Le mouvement d’Oxford est un réveil qui passe sur le monde entier, et qui pourrait être un moyen de salut pour l’humanité.
Nous avons vu des communistes et des hitlériens, des capitalistes et des sans-travail, des comtes et des bourgeois, des gens de tous pays, de l’Afrique du Sud, de l’Amérique, des Balkans, des Anglais, des Allemands, des Suisses, des hommes de toutes conditions, diplomates, banquiers, professeurs de théologie, pasteurs, médecins, avocats, ouvriers, instituteurs, des gens du monde et des " sportsmen " s’approcher de la croix du Christ et déclarer ouvertement vouloir le servir.
Je sais que, à nous autres gens d’Eglise, pareille chose semble extraordinaire et suspecte.
Nous nous en méfions comme d’une manifestation exagérée, malsaine.
Nous aimons mieux voir le Saint-Esprit suinter goutte à goutte, et nous sommes inquiets quand il se répand à flots, comme un torrent.
Examinons-nous !
Cette méfiance vient peut-être de ce que nous avons peur d’être entraînés ; nous savons que ces vagues nous arracheraient à nos vieilles habitudes confortables, que de nouvelles et grandes tâches réclameraient nos forces et notre volonté, et nous voudrions les esquiver !
J’en ai rencontré plus d’un qui se retirait, parce qu’il avait peur d’être empoigné, peur de devoir prendre la vie tout à fait au sérieux.
Mais je veux en venir à l’histoire de Corneille.
Je l’ai choisie parce que je voudrais prouver ceci : Ce que nous avons vécu à Ermatingen n’est rien de nouveau.
Déjà dans la première Eglise chrétienne, des choses toutes semblables se sont passées.
Dans notre récit, il est question d’un homme qui était pieux, qui craignait Dieu ; toute sa maison suivait son exemple.
Il était charitable et priait régulièrement.
Et cet homme reçoit un jour un ordre de Dieu, tout à fait clair, tout à fait précis.
Il a donc entendu ce que nous appelons dans les groupes une " direction. "
Et nous voyons ici, tout de suite, quelles conditions sont nécessaires pour qu’une telle direction soit possible.
1 – Corneille craint Dieu, c'est-à-dire il est humble devant Dieu, ou, - ce qui revient au même, - il est honnête envers lui-même.
2 – Il prie, c'est-à-dire il est en contact, en relation avec Dieu.
Celui qui connaît la manière de prier de l’Oriental sait que sa prière est souvent muette, contrairement à la nôtre.
3 – Il est bienfaisant, donc il cherche la communion fraternelle.
Là où ces conditions ne sont pas remplies, il serait téméraire de parler de direction.
Il y a des choses qui ressemblent à une direction, et qui sont pourtant très différentes : Nous avons des pressentiments, des idées parfois excellentes, nous avons des instincts, mais dans tout cela, le Saint-Esprit ne joue souvent aucun rôle.
Il n’y a direction que là où l’homme est tout à fait prêt à recevoir le Saint-Esprit, tout à fait prêt à obéir.
Outre Corneille, nous voyons Pierre, l’apôtre du Seigneur ; lui aussi prie, lui aussi cherche le contact avec Dieu, lui aussi pourra être dirigé.
Mais chez lui il y a des préjugés, des obstacles, un certain manque de charité ; l’exclusivisme juif n’est, au fond, que manque d’amour et orgueil spirituel ; cet exclusivisme se montre chez Pierre quand il déclare ne pas vouloir se souiller par le contact avec des païens.
Il faut, tout d’abord, que ces préjugés tombent.
Or, ils sont difficiles à enlever.
Par trois fois, Pierre entend ces mots : " Tue et mange. "
Et puis, enfin, il reçoit une direction nette et claire : " Lève-toi, et descends, et va-t-en avec ces hommes sans faire de difficultés, car c’est moi qui les ai envoyés. "
Nous apprenons ici une nouvelle leçon : Il est bon de comparer notre " direction ", c'est-à-dire ce que Dieu nous a révélé pendant que nous l’écoutions en silence, avec ce qui a été commandé à d’autres.
Le cœur humain se laisse bien facilement égarer.
Le diable, que Jésus prenait au sérieux comme une réalité, ne s’appelle pas sans raison le tentateur ; il s’efforce toujours de nous troubler.
Mais quand c’est vraiment Dieu qui conduit, les ordres donnés concordent.
Là où ce n’est pas le cas, nous ferons bien d’attendre, de nous taire jusqu’à ce que le désaccord soit effacé.
Dans notre récit, la direction divine donnée à Corneille correspond exactement à celle qui est donnée à Pierre.
Il arrive qu’un homme d’affaires déchire en deux une carte de visite, et qu’il écrive sur une moitié à un ami : " Je t’envoie un messager ; remets-lui telle ou telle somme. "
Le messager prouve qu’il a droit à recevoir l’argent en montrant l’autre moitié de la carte, qui s’adapte exactement au fragment envoyé d’abord.
Quand Dieu donne un ordre, une tâche concrète correspond toujours à cet ordre.
La direction seule ne suffit pas, il faut encore que l’obéissance soit absolue.
Ce que Dieu nous dit de faire, nous devons le faire strictement et immédiatement.
L’Esprit de Dieu demande une soumission militaire, sinon il cesse de nous diriger.
Ces deux hommes, Corneille et Pierre, obéissent promptement ; c’est pourquoi le miracle surgit sur leur chemin.
La moindre désobéissance les aurait privés du don le plus précieux que Dieu leur avait destiné.
Si nous n’écoutons pas bien, si nous éludons les ordres de Dieu, il manque un anneau dans la chaîne divine, le cercle ne peut pas se fermer.
Ne l’oublions pas !
Nous nous plaignons souvent d’avoir cru agir d’après une direction donnée et d’avoir abouti à une déception.
Avons-nous vraiment obéi exactement ?
Avons-nous vraiment écouté tout à fait attentivement ?
Pierre obéit ; et il ne va pas seul chez Corneille ; non, mais " quelques-uns des frères de Joppé l’accompagnèrent. "
Corneille, de son côté, invite toute sa parenté.
Pierre trouve chez lui " ses parents et ses plus intimes amis qu’il avait assemblés. "
C’est aussi une expérience que nous avons faite à Ermatingen.
Chacun avait éprouvé le besoin d’en amener d’autres.
Plusieurs groupes étaient là, formant une seule grande communauté.
Il est normal que ceux auxquels Dieu accorde ses grâces éprouvent aussitôt le désir de partager ces grâces avec d’autres.
La première chose que fait Pierre, c’est une confession.
Il reconnaît honnêtement qu’il lui en a coûté de venir, que Dieu l’a pris à son école.
Il raconte tout ce qui s’est passé, comment ses préjugés ont été détruits, comment il a été dirigé, comment il a obéi.
Corneille aussi parle de ce qu’il a entendu, de la direction qu’il a reçue : " Il y a maintenant quatre jours que j’étais en jeûne et en prière dans ma maison à la neuvième heure, et tout d’un coup un homme, vêtu d’un habit resplendissant, se présenta devant moi, et me dit : Corneille, ta prière est exaucée, et Dieu s’est souvenu de tes aumônes. Envoie donc à Joppé, et fais venir Simon, surnommé Pierre ; il est logé dans la maison de Simon, corroyeur, près de la mer ; quand il sera venu, il te parlera. "
Et de nouveau, nous pouvons établir un parallèle : La ressemblance entre notre récit et ce que nous avons vu à Ermatingen est frappante.
Là aussi, les gens racontaient comment et pourquoi ils étaient venus.
Il n’est évidemment pas nécessaire que chacun étale son linge sale pour le laver devant tous ; il vaut mieux faire cela en tête-à-tête ; sur ce point aussi, il faut la direction et la discipline du Saint-Esprit.
Non, chacun racontera plutôt ses dernières expériences intérieures, tout ce qui pourrait intéresser ceux qui sont venus, les aider d’une manière ou d’une autre.
Tous les événements qui arrivent ont une cause extérieure et une cause intérieure ; c’est cette dernière seule qui importe.
De tous les livres qui paraissent, ceux qui nous intéressent le plus sont les biographies, les descriptions de vies réellement vécues.
Et parmi ces biographies, lesquelles ont le plus de valeur ?
Celles où il s’agit, non de circonstances extérieures, mais d’un développement intérieur, de la formation d’un caractère.
Et la plus intéressante de toutes sera celle qui me parle de l’action du Saint-Esprit dans un cœur humain.
Là où nous voyons cette action, tout le reste paraît sans importance : Les journaux, les romans, l’art, le sport, la politique, les affaires.
Ce que nous avons vécu à Ermatingen, à ce point de vue, était saisissant.
Nous y avons vu des hommes, des gens du monde, selon toute apparence, qui n’avaient pas l’air " momiers " du tout, qu’on ne se serait pas attendu à rencontrer à l’Église, et tous ceux-là n’avaient pas de désir plus ardent que de voir le Saint-Esprit agir, se manifester, opérer des miracles.
Il en était ainsi chez Corneille : Ces gens avaient tout quitté, tout laissé pour être prêts à recevoir le Saint-Esprit, à écouter ses ordres.
Nous aussi, nous avons pu dire comme Pierre : " Dieu m’a fait voir que je ne devais appeler aucun homme souillé ou impur. "
Ces sportsmen anglais, ces médecins et ces commerçants, ces grandes dames et ces communistes avaient plus à nous dire que les pasteurs et les théologiens, qui ont pourtant l’habitude de parler de ces choses.
Et pourquoi cela ?
C’est que ces gens ne voulaient ni discuter, ni enseigner, ni endoctriner, mais rendre un témoignage.
Le Saint-Esprit leur avait montré, parce qu’ils avaient su l’écouter, une grande lacune dans notre vie et nos formes religieuses, une lacune qui nous prive de choses excellentes.
Nous croyons toujours posséder les choses que nous avons saisies par notre raison, que nous avons comprises et dont nous pouvons parler.
Ainsi, nous savons prêcher sur Dieu, sur le péché, sur la croix, sur la nouvelle naissance, et sur bien d’autres sujets, et pourtant nous n’arrivons à rien.
Hélas ! Trop souvent toutes ces paroles étouffent quelque chose en nous !
Surtout dans le domaine religieux, elles sont comme un succédané qui remplace l’acte.
Et pourtant, là où il s’agit de la volonté de Dieu, quelque chose doit se passer ; là, Dieu est présent, et, par conséquent, il est à l’œuvre.
Là, il y a toujours haute tension, et il faut qu’on le remarque aussi dans nos cultes, partout où des hommes ont été saisis par Dieu.
Nos cultes ne doivent pas être comme des leçons de sciences naturelles, où l’on parle du feu, par exemple : Il éclaire, il consume, il produit de la chaleur.
Non, ces cultes doivent nous mettre en contact avec le feu lui-même, comme si nous étions dans une forge où la flamme jaillit, brûle les yeux, illumine et chauffe.
Maintenant, nous savons ce qu’est le feu, bien mieux qu’en nous bornant à écouter ceux qui en parlaient.
Nous devons entrer en contact direct avec les vérités divines, faire l’expérience de ce qu’est le Saint-Esprit.
Nous devons voir nous-mêmes et comprendre comment il transforme et libère les hommes, amollit et réchauffe les cœurs, ouvre les intelligences, dessille les yeux, crée une véracité, une honnêteté et une discipline inconnues jusqu’alors.
Cela vaut mieux que de faire ou d’écouter des causeries pieuses sur le Saint-Esprit.
Aussi longtemps qu’on discute et disserte, le miracle est impossible.
Celui qui se contente de prêcher sur le Saint-Esprit l’empêche d’agir.
Le discours de Pierre dans la maison de Corneille n’est pas un sermon, mais un témoignage.
Il ne mentionne pas même le Saint-Esprit, mais, pendant qu’il parle, les assistants sentent que cet Esprit agit en eux.
Nous savons qu’ils l’ont reçu, car, est-il dit, " ils glorifiaient Dieu. "
Nous pouvons tous chanter des cantiques d’actions de grâces ; ils se trouvent soigneusement classés dans nos recueils.
Beaucoup savent louer Dieu et citer solennellement des passages bibliques ; certains sont même devenus très habiles à ce point de vue.
Mais célébrer Dieu parce que le cœur déborde de joie et de reconnaissance, cela est possible seulement à celui qui a reçu le Saint-Esprit, à celui que cet Esprit a rendu indiciblement riche et heureux.
Rien n’est plus difficile que de chanter les louanges de Dieu tout à fait honnêtement.
Ceux de la maison de Corneille le peuvent, le doivent, et cela prouve que quelque chose s’est passé en eux.
Les sources ont jailli ; rien ne pourra les empêcher de couler.
Puis vient le baptême, et ils demandent à Pierre et à ses compagnons " de demeurer quelques jours avec eux. "
Là où le Saint-Esprit agit, on éprouve le besoin d’être ensemble.
On comprend ce que Jésus voulait exprimer en disant : " Quiconque fera la volonté de mon Père qui est aux cieux, c’est celui-là qui est mon frère, et ma sœur, et ma mère. "
Alors les murs de séparation tombent.
Il y a quelque chose de plus fort que les sympathies et les antipathies ; on jouit les uns des autres, on jouit de donner et de recevoir.
Le récit est terminé.
Pourquoi a-t-il été conservé dans le livre des Actes ?
Pour que nous sachions ce qui est arrivé jadis, que nous possédions un document concernant les premiers temps du christianisme ?
Non, mes amis, ce n’est certainement pas pour cette raison.
Ce que le Saint-Esprit a pu faire alors, il peut et il veut le faire aujourd’hui.
Jésus nous a promis son Esprit comme un don éternellement vivant, qui doit nous consoler, nous fortifier, nous diriger jour après jour, jusqu’à la fin du monde et nous conduire dans toute la vérité.
Nous sommes seulement trop maladroits pour saisir ce qu’il nous offre : Nous ne pouvons pas croire que toutes ces merveilleuses richesses sont là pour nous, et qu’elles sont réelles.
Nous sommes encore assez insensés pour accuser de fanatisme ceux qui croient vraiment et sérieusement à la réalité de l’Esprit saint.
Nous sommes comme des gens auxquels on aurait apporté une corbeille de fruits magnifiques et qui les laisseraient pourrir, dans la crainte que cette corbeille ne leur fût pas destinée ou que ces fruits ne fussent pas mangeables.
Oh ! Mes amis, que cette belle histoire de la première " House-party " dans la maison de Corneille nous donne le courage d’être plus attentifs à la voix de Dieu qui veut nous diriger, de vaincre nos préjugés, d’obéir aux ordres divins !
Dieu a des moyens merveilleux pour communiquer son Esprit aux hommes.
Suivons son chemin docilement, et nous ferons l’expérience que, sur ce chemin, il arrive des miracles, et qu’on y trouve le bonheur.
Pendant ces journées d’Ermatingen, nous avons senti le souffle de l’Esprit divin.
Ceux qui étaient là, - beaucoup de pasteurs aussi, - ont déclaré unanimement et avec la joie la plus intense que j’ai vue de ma vie : " J’ai été abondamment béni. "
Et tous ceux qui, comme eux, s’ouvriront sincèrement à l’action divine et se mettront à la disposition du Maître, pourront le dire un jour également.